La démocratisation de l’automobile – 1930 – 1939

Pendant les années 1930, l’automobile connaît un développement technique important. La production des véhicules s’accroît avec l’idée de concevoir une voiture populaire. Toutefois la crise de 1929 fait des ravages chez les constructeurs automobiles, certaines marques disparaîtront définitivement au début des années 1930.

Un bon incroyable au niveau technologique fait progresser considérablement le domaine de l’automobile comme la carrosserie monocoque, la traction avant, le développement de l’aérodynamique des carrosseries.

L’automobile se développe en France

Du côté des constructeurs automobiles français, des innovations font avancer le secteur automobile. Mais le début de la seconde guerre mondiale changera la donne et les constructeurs automobiles devront se consacrer à l’effort de guerre.

La Citroën Rosalie est présentée pour la première fois au salon de l’automobile de Paris en 1932. Trois modèles avec trois motorisations différentes 8, 10,15 ce sont commercialisés. Le moteur « flottant » est une innovation de Citroën consistant à filtrer les vibrations dû au moteur en interposant entre celui-ci et le châssis, des blocs élastiques de caoutchouc. Pour mettre en avant cette innovation, Citroën choisie d’orner la carrosserie de l’emblème « d’un cygne qui vogue entre deux chevrons ».

La Citroën 8cv surnommée la petite Rosalie est le plus petit modèle de la série. Elle a une carrosserie monopièce comme les autres Rosalie, plus résistante d’une carrosserie tout en acier. Elle a un moteur de 1452 cm3 de 32 ch et atteint en pointe les 90 km/h. 38835 exemplaires sont produits entre octobre 1932 et janvier 1935. 

La Citroën Rosalie 10cv est plus longue de 30 cm que la petite Rosalie. Elle a un moteur de 1763 cm3 développant 36 ch et peut atteindre une vitesse en pointe de 100 km/h. 49249 exemplaires sortent des chaînes jusqu’en 1935. 

La version 15cv de la Rosalie a un moteur six cylindres de 2650 cm3 développant 56 ch. Elle est allongée de 15 cm par rapport à la 10 cv pour pouvoir héberger le moteur plus gros. 7228 exemplaires sont produits entre octobre 1932 et janvier 1935. 

Par la suite, Citroën développe une voiture nommée Traction Avant qui est un gros succès commercial de la marque aux chevrons. La Traction Avant est une véritable révolution technique qui a donné son nom au modèle. La Citroën Traction Avant se distingue par sa carrosserie autoportante en acier aérodynamique. L’ingénieur André Lefèvre et le designer Flaminio Bertoni ont développé une forme bien pensé, avec une structure d’habitacle monobloc et une répartition équilibrée des charges résultant de l’abaissement du centre de gravité et du montage de la boîte de vitesse devant le moteur et l’essieu avant. La Traction avant a une excellente tenue de route. Elle est aussi confortable. D’autres innovations tels que les freins hydrauliques, la suspension indépendante des roues avant et le système de direction à crémaillière font sensation à l’époque. Le moteur quatre cylindres « flottant » est équipé de soupapes en tête actionnées par des culbuteurs moulés par centrifugation et des chemises de cylindres humides amovibles. Le moteur de 1303 cm3 a une puissance de 32 ch, associé à une boîte de vitesses à trois rapports. Elle peut atteindre une vitesse maximum de 95 km/h et consomme 9l / 100 km. 

«  La Traction Avant dompte la force centrifuge » nous indique le slogan publicitaire. 

Présentée en 1934, la Type 7a est remplacée quelques mois plus tard par la Type 7b  et 7c plus puissante ; la 7s (sport) est développée en versions 11A et 11B. Plus tard, ces modèles sont appelés 7cv et 11cv. 

Outre les légendaires prototypes huit cylindres de 1934, les 22cv, qui n’ont jamais été produites en série, sont des exemplaires de la Traction Avant devenus mythiques.

La « 15 six » (15 cv) est produite à partir de 1938, entraîné par un moteur six cylindres en ligne de 2,8 litres est synonyme de grand confort routier.

Renault poursuit également son développement au cours des années 30 avec la Renault Celtaquatre et la Juvaquatre.

La Celtaquatre se caractérise par une carrosserie au forme douce. La Celtaquatre est produite à partir de 1934. Sous l’influence des exploits des pionniers de l’aviation et des voitures de sport, les formes des voitures changent : les calandres s’inclinent, les lignes s’adoucissent. La Celtaquatre a son arrière arrondi qui lui donne le surnom de « Celtaboule ». Cette petite voiture de 8cv est capable d’emmener quatre personnes à 100 km/h. En face de l’innovante Traction Avant de Citroën, la Celtaquatre fait valoir sa robustesse et sa fiabilité. A partir de 1936, la Celtaquatre a une nouvelle carrosserie, lui enlevant son arrière si caractéristique et ses marches-pieds. Elle est retirée du catalogue en 1938 au profit de la Juvaquatre. 

La Renault Juvaquatre est destinée à une clientèle familiale. Elle est présentée en 1937 au salon automobile de Paris. S’adressant aux revenus modestes, cette 6cv est la première voiture à adopter une carrosserie monocoque et des roues indépendantes. Son confort est amélioré. Au printemps 1938, une berline quatre porte complète la gamme afin de concurrencer la Peugeot 202 ou la Traction Citroën. La guerre va toutefois stopper l’élan de la Juvaquatre. Une version fourgonnette connaît un franc succès auprès des artisans, commerçants et des services publics.

Du côté de Peugeot, c’est le début des voitures des séries 200, 300 et 400. L’approche du design aérodynamique est appliquée aux modèles de voiture dès 1935.

La Peugeot 301 est la première voiture de la série 300 commercialisée de 1932 à 1936. Elle a un moteur de 1463 cm2 développant 35 ch. En pleine crise économique, Peugeot répond à la demande de sa clientèle en présentant la Peugeot 301. Elle est produite à 70500 en différentes carrosseries : berline, limousine, coupé, cabriolet et roadster. 

La Peugeot 401 est commercialisée très peu de temps de 1934 à 1935. Elle dispose de suspension avant avec des roues indépendantes. Elle a un moteur de quatre cylindres en ligne de 1720 cm » développant 44 ch avec une vitesse maximale de 100 km/h. C’est une berline familiale parmi les plus rapides de son époque. Sa conception avec ossature bois et son freinage à câbles font que la Peugeot 401 est déjà dépassée à sa sortie. La 401 est rapidement remplacée par la 402. 

Le Streamline Moderne 

Alors que la crise touche le monde, les américains inventent un nouveau mouvement artistique le Streamline Moderne aussi appelé en France le style paquebot. Ce style s’inspire de l’univers nautique au travers de lignes horizontales, de courbes et de volumes lisses. Le mouvement touche autant l’architecture, les objets du quotidien que l’automobile. Le métier de désigner voit le jour au même moment que le mouvement Streamline, en effet le souci d’esthétique devient indispensable afin de faire face à la concurrence. Dès le salon de Paris en 1933, les voitures ont une ligne aérodynamique. Sur tous les modèles, les pares-brises s’inclinent, les calandres s’arrondissent, les arrières s’allongent, les lignes s’épaississent et les ailes s’enveloppent. La surface extérieure est conçue de telle sorte qu’en rencontrant l’eau ou l’air il y a moins de turbulences possibles.

Les débuts de l’aérodynamisme dans l’automobile

Dans les années 1930, les ingénieurs et les stylistes s’intéressent à l’aérodynamisme. La première voiture de ce type est la Chrysler Airflow. Elle est produite de 1934 à 1937 à 28878 exemplaires. Dans le même temps, la De Soto Airflow du groupe Chrysler est commercialisée avec une carrosserie plus courte. Après des recherches sur les conséquences du design automobile dans la pénétration de l’air du véhicule, les maquettes sont testées en soufflerie. Le choix se porte sur une carrosserie monocoque tout en acier. 

« Je crois sincèrement qu’elle apportera une nouvelle tendance dans le transport de personnel ». Nous dit Walter Chrysler.

Sa résistance est également démontrée par Chrysler en jetant une Airflow d’une falaise, celle-ci après un tonneau, atterrit sur ses roues sans déformation majeure. Toutefois l’enthousiasme de la clientèle est mitigé, les premières voitures rencontrent des problèmes comme les soudures qui lâchent à grande vitesse. Des modifications sont alors apportées aux voitures suivantes, notamment une face avant avec une calandre en V et des pare-chocs plus proche de la gamme conventionnelle de la marque. 

La Chrysler Airflow inspire de nombreux modèles de véhicules produits dans les années 1930 comme les Peugeot 402 et 202, la Volvo PV 36, la Toyota AA. 

La Peugeot 402 est produite à partir de 1935 pour remplacer la 401 et la 602. Peugeot suit l’idée du Streamline Moderne pour la Peugeot 402 avec des courbes fluides et un souci d’aérodynamique. 

Peugeot imagine la 402 pour concurrencer Citroën qui vient de sortir la traction avant. Le moteur est un quatre cylindres culbuté de 1991 cm3 de 55 ch. Elle a un châssis « Bloctube » rigide, quatre freins à tambours à câbles. La boîte de vitesses a trois rapports dont la seconde et la troisième sont synchronisées. La 402 connaît un franc succès auprès de la clientèle. Utilisé en véhicule de liaison par l’armée française, 1000 véhicules sont commandés au début de la seconde guerre mondiale. La 402 est proposée en différentes carrosseries : limousines à six glaces, familiale, cabriolet, roadster, éclipse, commerciale et taxi.  

La voiture suivante produite par Peugeot est la 202 commercialisée à partir de 1938. Après avoir lancé la 402, Peugeot désire offrir à sa clientèle un modèle plus accessible. La Peugeot 202 est une voiture quatre places accessibles par quatre portes dont celle de devant s’ouvre dans le sens de la marche. Elle s’inspire des lignes aérodynamiques de la 402 mais en plus compacte. A l’arrière, il n’y a pas de couvercle de malle mais une roue de secours. La clientèle est séduite par son élégance malgré un petit moteur de 1133 cm3 développant 30 ch. 20000 voitures sont vendues en 1938. En 1939, l’armée française réquisitionne des Peugeot 202, utilisés comme voiture de commandement, de liaison et aussi anti-aérien avec l’ajout d’un FM 24/29. 

La Bugatti 57 SC Atlantic incarne l’élégance, la sportivité, le luxe et la rareté. Devenu une légende de la marque, ce modèle hors du commun est construit entre 1936 et 1938. Quatre modèles sont réalisés et trois sont encore aujourd’hui conservés. 

En 1930, Jean Bugatti modernise la marque. Il décide de créer un modèle de base décliné en différentes variantes. C’est ainsi que naît la Bugatti Type 57. Les variantes sont proposées en différentes motorisations et carrosseries telles que la Gabilibier (berline quatre portes), la Stelvio (cabriolet), la Ventoux (deux portes) et l’Atlantic (coupé). Entre 1934 et 1940, 800 versions de la Type 57 sont vendues. 

La version Atlantic est développée à partir du concept Aérolithe. La carrosserie est en électron, un alliage de magnésium et d’aluminium. Léger et résistant, il ne peut toutefois pas être soudé. C’est pour cela que les panneaux de carrosserie sont rivetés. La Bugatti 57 SC Atlantic est un chef d’œuvre du design automobile. Sous le capot, un moteur huit cylindres de 200 ch se distingue autant par sa mécanique précise que par sa puissance allant jusqu’à 200 km/h. La deuxième Bugatti 57SC Atlantic, celle de Jean Bugatti a disparu il y a quelques années et cela reste un grand mystère. Selon les experts, si elle venait à refaire surface, sa valeur dépasserait les 100 millions d’euros. 

Les concours d’élégance

Les concours d’élégance représentent une mise en scène avec les plus belles automobiles dans un cadre raffiné et chic comme Deauville, La Baule, Longchamps, Cannes et Nice. Dans les années 30, la voiture reste un luxe inaccessible et fait rêver les spectateurs. Les voitures sont sélectionnées parmi les marques les plus prestigieuses du marché qu’elles soient françaises ou étrangères. Toutefois, une voiture plus modeste peut concourir dans sa propre catégorie. Dans un concours d’élégance, la femme est mise à l’honneur au volant et au côté de belles carrosseries et parfois accompagnée d’un chien. Elle est habillée de manière à se marier au plus près de la carrosserie présentée. Les tenues sont issues des maisons de hautes coutures parisiennes. Chaque participant reçoit un prix mais un palmarès est attribué aux trois plus belles voitures ainsi qu’un prix d’honneur. 

La voiture du peuple

La « voiture du peuple » est née sous l’influence de plusieurs dictateurs européens. 

La Fiat 500 Topolino est créée à la suite de la demande du dictateur italien Mussolini à Giovanni Angelli, fondateur de Fiat. Mussolini veut relancer l’économie italienne en proposant aux familles italiennes la possibilité d’acheter une voiture ne dépassant pas les 5000 lires. A l’époque, les modèles les moins chers de voiture comme la Fiat 508 Balilla se vendent plus de 10000 Lires. Le premier prototype de la Fiat 500 Topolino à traction avant est testé en 1931 mais après avoir parcouru plusieurs kilomètres, dans une montée, le moteur prend feu suite à une fuite de carburant. Angelli décide que Fiat ne produira plus de voitures à traction avant. Le projet de petite voiture se poursuit sans enthousiasme mais Mussolini rappelle à Fiat sa demande. Il faut attendre encore quelques années pour qu’un nouveau projet soit prototypé, testé et validé sur route. La Fiat 500-A est présentée au salon de l’automobile de Turin en 1936 puis mise en vente dans les concessions Fiat en Italie, en France sous le nom de Simca 5 et en Allemagne chez FIAT-NSU. Elle est finalement vendue au prix de 8900 Lires. Elle a un moteur placé à l’arrière de quatre cylindres de 567 cm3 d’une puissance de 13 ch. La petite Fiat atteint les 85 km/h. Sa consommation est de 5l au 100 km. La Fiat 500 Topolino rencontre un franc succès auprès de la clientèle mais la guerre ralentit sa production. 

L’idée d’une voiture accessible aux personnes les plus modestes plaît au dictateur allemand. Hitler demande à Ferdinand Porsche de concevoir une voiture familiale, sobre, pouvant atteindre 100 km/h et surtout peu onéreuse. La KDF – Wagen ou Volkswagen Coccinelle plus tard, est avant tout un moyen de propagande pour asseoir la suprématie du régime national socialiste. 

Ferdinand Porsche a travaillé auparavant pour NSU Motorwerke sur un modèle de petite voiture. Ce prototype est présenté en 1934 avec une suspension à barre de torsion, un moteur refroidi par air et une carrosserie arrondie. La Porsche Type 32 ne peut aboutir faute de difficultés financières d’NSU Motorwerke. Suite à la proposition du « Reichsverband der deutschen automobile industrie », Ferdinand Porsche conçoit un prototype nommée VW série 3. Des améliorations sont alors apportées au précédent prototype. Un cabriolet est également présenté plus tard et des évolutions sont apportées jusqu’au premier essai sur route. En fin d’année 1936, le prototype VW série 3 est testé sur l’autoroute et sur des routes de montagne. Les essais sont concluants. En 1937, de nouveaux essais et cette fois d’endurance sont effectués avec quatre véhicules nommés W30. 7000 kilomètres sont réalisés au travers des Alpes orientales. Les essais révèlent qu’il faut améliorer le carburateur, les freins et la boîte de vitesses. Les voitures W30 ont parcouru au total deux millions de kilomètres en 1938 lors des essais routiers. Les 30 véhicules sont présentés dans de nombreuses villes allemandes. 

La KDF-Wagen est dévoilée publiquement le 26 mai 1938, lors de la pose de la première pierre de l’usine de Wolfburg. Elle est présentée en trois versions : berline, découvrable et cabriolet aux 50 000 personnes présentes. La KDF-Wagen est exposée au salon de l’automobile et de la moto de Berlin en février 1939. 

Elle est dotée d’un moteur arrière de quatre cylindres à plat refroidi par air de 985 cm3 d’une puissance de 24ch. Sa lunette arrière en deux parties lui donnera le nom de « Split ». Les toutes premières KDF ont les poignées de portes qui s’actionnent en tournant de haut en bas, les coins de capots arrière carrés, un feu arrière spécial et des enjoliveurs lisses. Il y a 48 fentes d’aérations. Puis en 1939, le feu arrière devient de type militaire, les poignées de portes se tirent et les enjoliveurs ont le sigle KDF. 210 voitures sont construites avant le début de la guerre. 

Pour permettre d’acquérir la voiture, un système d’épargne est mis en place. La personne doit remplir durant quatre années des carnets collecteurs de timbres à 5 Reichsmark au rythme d’un timbre par semaine pour un total de 990 Reichmark. 336 638 souscripteurs s’engagent dans l’opération, les sommes récoltées doivent être gérées par l’association de loisirs contrôlée par l’état « KDF » (Kraft Druch Freude, la force par la joie) mais en réalité l’argent récolté est utilisé différemment. La construction de l’usine de la KDF démarre courant 1938. Fin 1939, les 600 premières voitures sont attribués à la Wehrmacht et à des dignitaires du parti puis l’argent des souscripteurs sert également à la construction de véhicules militaires (Kübelwagen). 

Lire l’article sur L’automobile durant l’occupation