Volkswagen dans l’après-guerre

La KDF-Wagen est née de l’idée d’Hitler de créer une voiture du peuple avec l’aide de l’ingénieur Ferdinand Porsche. Après les années sombres de la Seconde Guerre Mondiale, l’usine Volkswagen est reprise par les britanniques pour contribuer à relancer l’économie allemande. C’est ainsi que la production en série de la Volkswagen Coccinelle débuta en 1945.

Quelques années auparavant

Pendant la seconde guerre mondiale, l’usine est utilisée par l’armée allemande pour fabriquer des Kübelwagen et des véhicules amphibies les Schwimmwagen. Des Kommanderwagen sont également produites avec des carrosserie de KDF-Wagen, un châssis de Kübelwagen et des pneus tout-terrain . Mais la fabrication de véhicules n’est qu’une petite partie de l’activité. L’usine utilise des condamnés aux travaux forcés ou des personnes déportées pour fabriquer du matériel pour l’armée allemande. 

En 1944, l’usine est bombardée par l’armée américaine à plusieurs reprises causant de graves dégâts aux bâtiments et à la chaîne de montage. 

En 1945, l’armée américaine occupe la ville de KDF-Wagen. Les travailleurs forcés sont libérés. Le nom de la ville est renommée en Wolfburg à cause du château qui se trouve à proximité de l’usine.

Sous la responsabilité des britanniques

En juin 1945, l’armée britannique assume la tutelle de Volkswagenwerk GmbH. A la fin de la seconde guerre mondiale, la production de Volkswagen Type 1 commence avec un plan visant à utiliser la voiture pour des transports urgents dans leur zone d’occupation. 

Le major Ivan Hirst prend le poste d’officier résident principal tandis que Hermann Münch est au poste d’administrateur principal. 

A la fin de l’année 1945, 55 VW Coccinelle sortent des chaînes de production.

Les épargnants lésés

Le programme d’épargne de KDF permet aux clients d’acheter des timbres à coller sur un carnet, une fois le carnet rempli ils peuvent acquérir la KDF Wagen. Sauf que la guerre a commencé et les acheteurs ne seront jamais livrés de leur voiture. 

Les anciens épargnants sont allés au tribunal pour exiger qu’on les rembourse ou qu’on leur donne la voiture sauf qu’ils ne seront pas remboursés. La commission de contrôle de l’Allemagne craint que Volkswagen soit mis en faillite rapidement. Alors Volkswagen leur accorde une remise pour l’achat d’une VW Coccinelle.

Major Ivan Hirst

Le major Ivan Hirst joue un rôle clé dans le développement de Volkswagen et protège l’usine de la démolition imminente. Sa clairvoyance et son talent d’improvisation permettent de démarrer la production automobile rapidement dans cette période de rationnement et de pénurie. Avec son enthousiasme pour la technologie, les voitures et sa détermination, Hirst réussit à transformer l’usine d’armement en partie démolie en une industrie civile dans un temps record. 

Ivan Hirst arrive à Wolfsburg en août 1945. 

A l’exception du bureau REME qui n’est pas sous la responsabilité de Hirst, très peu d’homme travaille réellement dans l’usine. De grandes parties du site semblent abandonnées.

« Sur place, il y a une puanteur épouvantable, une odeur abominable. Tous les drains sont endommagés à cause des raids aériens et jamais réparés. Les toilettes sont hors d’usage, complètement non-hygiéniques. Horrible ! »

La ville de Wolfsburg

Hirst se souvient que la ville de Wolfsburg ressemble à un chantier en construction malgré qu’elle n’est pas subit de violent bombardement. Wolfsburg est abandonnée depuis 2 ans. Les camps constitués de huttes et de cabanes dominent une grande partie de la ville. A l’origine, la ville est prévue pour 100 000 habitants. Avec des larges rues et des blocs de logements individuels, la ville représente un environnement moderne et adapté à la voiture. Cependant en septembre 1945, Wolfsburg compte que 25 000 habitants y compris les travailleurs forcés. Les larges rues sont endommagées et envahies par l’herbe. Hirst se souvient qu’une Coccinelle a roulé sur le trou d’une bouche d’égout et ça a endommagé l’essieu avant. 

Il est aussi intrigué par les tenues vestimentaires des jeunes filles dans la rue plus particulièrement de leurs jupes rouges. Il a compris que les jupes sont confectionnées à partir d’un vieux drapeau nazis. Non pas parce qu’elles sont partisanes de l’idéologie mais bien parce qu’il n’y a plus que ce tissu pour se confectionner des vêtements. Dans les rues, on entend parler différentes langues. La ville abrite 9000 anciens travailleurs forcés et d’autres personnes déplacées. Les alliés ont choisi Wolfsburg pour installer un camp de réfugiés. 

Les Royal Electrical and Mechanical Engineers ont déjà installé un grand atelier dans l’usine Volkswagen. Il comporte trois zones : un atelier de réparation de véhicules militaires britanniques, un pour les moteurs et un autre pour les pièces de rechange.

Platten Wagen

Hirst rencontre des difficultés dans l’usine :  une des difficultés est le transport en interne dans l’usine. Il y a très peu de voitures électriques pour transporter le matériel autour de l’usine. J’ai donc emprunté à l’armée britannique des chariots élévateurs à essence. Les esprits se sont échauffés. Du coup, l’armée a dit ; nous voulons que ceux-ci reviennent et Brörmann a dit que c’était la fin de la production.  Alors je lui ai répondu : je prends un châssis de Kübelwagen et je mets une planche plate à une extrémité, un siège sur le moteur et un volant. C’est comme cela qu’est né le Plattenwagen utilisé dans l’usine Volkswagen. Plus tard Pon, l’importateur, souhaite pour ses entreprises hollandaises des Plattenwagen. De là, Pon a parlé à Nordhoff et le Volkswagen Combi est créé.

L’usine Volkswagen

En 1946, le déblaiement des décombres et le nettoyage du site se poursuit. Les zones principales sont déjà déminées. Au cours de l’été, Hirst profite de la semaine de fermeture de l’usine pour déplacer les machines qui étaient encore au sous-sol jusque dans les halls de production. A cause du manque de pièces, les ouvriers ont fabriqué eux-mêmes des pièces et une nouvelle ligne de production est créée à cet effet dans des locaux fraîchement rénovés.

De 1946 jusqu’à la réforme monétaire environ 1000 voitures sont produites par mois.

Des améliorations sur la Coccinelle

Hirst n’était pas content du niveau de bruit de la boîte de vitesses de la Coccinelle. Le bureau d’étude teste l’utilisation de la laine, du feutre et de la toile de jute pour réduire le bruit. Progressivement les réglementations sur les véhicules et la sécurité routière prennent de l’importance. Hirst s’assure que le klaxon, les clignotants, les essuies glaces et le contacteur d’allumage répondent aux exigences.

En octobre 1946, la 10000e Volkswagen sort des chaînes. Les photos montrent le major Hirst avec les ouvriers. Sur les photos, on voit inscrit sur un panneau « un vrai repas, de la bière, une vie sans soucis » et sur un autre panneau « 10000 voitures, mais rien à manger. Pouvons-nous le supporter ? ». 

En novembre 1946, Volkswagen emploie des apprentis. La formation des jeunes est devenues une étape fondamentale pour la création de main d’œuvre permanente jusqu’alors Volkswagen souffre de mains d’œuvres puisque les ouvriers préfèrent travailler dans les champs s’assurant un peu de nourriture en échange du travail effectué et pour d’autres n’étant pas natif de la région, ils n’ont pas d’intérêt à rester à Wolfsburg. 

En 1947, Hirst pense que la production peut être portée à 2500 voitures par mois d’ici janvier 1948, une fois que l’usine est approvisionnée de machines supplémentaires. La pénurie de main-d’œuvre continue en 1947 et elle ne peut pas être comblée par les prisonniers de guerre allemands libérés. Pourtant en octobre 1946, le gouvernement militaire britannique a introduit une exigence de travail pour les personnes déplacées. Ils sont hébergés dans des camps « Lettenlager ». Les conditions de vie peuvent être largement améliorées mais les britanniques savent que les personnes déplacées campent dans de très mauvaises conditions.

Des problèmes de sécurité et des Coccinelle de très mauvaises qualités

L’usine Volkswagen s’approche lentement d’une véritable croissance du marché de la production et des ventes. Hirst se rend compte que le travail n’est pas fait en toute sécurité et il ne peut pas compter sur le directeur général Münch qui ne se soucie pas de tout cela bien que les soucis de sécurité sont de sa responsabilité. Par exemple, en décembre 1947, Hirst constate que les soudeurs travaillent sans lunettes de protection, les femmes travaillent à proximité de machine sans les cheveux attachés et les travailleurs de l’atelier de peintures n’ont pas de masques. Dans l’usine Volkswagen, de grands projets pour l’avenir sont en cours. Avec enthousiasme, Hirst annonce le 22 mars 1947 aux personnels de Volkswagen que la possibilité d’exporter les Coccinelle est envisagée. Mais pour cela il faut que le niveau de production couvre à la fois la demande des alliés et que la qualité de la production soit suffisante. Même si les matériaux ne le sont pas forcément, les tôles et les tissus sont de très mauvaises qualités. Il s’agit de faire une voiture avec ce qu’ils pouvaient avoir. 

Ainsi, les premières voitures sont de très mauvaises qualités. La qualité est extrêmement importante pour obtenir des voitures qui fonctionnent et que l’on garde longtemps. Bien que les pires problèmes soient identifiés par le contrôle qualité, il reste beaucoup de choses à régler sur la Coccinelle. Les portes et les capots ne ferment pas correctement. Les problèmes de boîte de vitesses sont courants. Le verre utilisé pour les phares et l’éclairage intérieur se brisent souvent. Parfois, le carburateur se bloque avant que la Coccinelle ne quitte l’usine. La carrosserie présente de graves défauts et des problèmes de rouille. Ces problèmes sont dus en partie au stockage des véhicules sans être à l’abri des intempéries. Les conséquences sont tellement catastrophiques que les voitures sont retouchées ou complètement repeintes avant de quitter l’usine. 

Les plaintes des clients se sont multipliées et Hirst se rend compte de la désorganisation du service après-vente. Les pièces détachées ne sont pas livrées aux ateliers. Au sein de Volkswagen, la plupart pensent que puisque les matériaux sont rares, la qualité, n’est pas un problème. Les tensions augmentent entre les britanniques et les allemands. C’est le chef du bureau d’étude qui explique en décembre 1946 au directeur général les problèmes dans la fabrication et l’assemblage de la Coccinelle. Pourtant, la voiture est encore en avance sur son temps au niveau technologique. Kalis pense que les britanniques sont plus soucieux de la quantité que de la qualité. Volkswagen doit se forger une bonne réputation pour perdurer dans l’avenir et Hirst annonce qu’il faut tester les pièces avant le montage. Il a aussi le soucis du détail, les Coccinelle noires sont équipés d’un volant noir. 

Au cours du premier semestre 1947, des expériences et des essais sont menées. Si les progrès se font lentement en ce qui concerne la carrosserie, le châssis a déjà des performances remarquables. Les raccords et la boîte de vitesses sont révisés pour que les composants soient assemblés sans difficultés. La bonne nouvelle, c’est que les clients ont diminué leurs plaintes de manière spectaculaire. 

Présentation dans les salons automobile et industriel

Volkswagen présente la Coccinelle au salon industriel de Hanovre en août 1947 pour la première fois. Deux modèles sont en démonstration pour promouvoir l’exportation vers la Suisse. Hirst demande que les Coccinelle soient conduite avant la livraison. Chaque voiture doit avoir parcouru 1000 km puis être décarbonée. La carrosserie doit être de qualité mais pas trop brillante. Des phares, des pare-chocs et des enjoliveurs chromés sont nécessaires. La sellerie doit être de qualité supérieure et fabriquée à partir du même tissu que l’uniforme des chauffeurs. 

La Volkswagen Coccinelle est présentée pour la première fois à l’internationale au salon automobile de Paris en août 1947. Hirst craignait les réactions mais la simplicité et la robustesse de la voiture montre que le modèle est rentable par rapport à la concurrence.

Exportation vers les Pays-Bas

En octobre 1947, cinq Coccinelle sont exportées aux Pays-Bas. Un accord d’exportation est conclu dans l’été 1947 entre Volkswagen et les frères Pon. L’exportation devait se faire plus tôt mais Volkswagen rencontre des difficultés à approvisionner les services clients en pièces et en outils. 

Changement de tutelle pour Volkswagen

En 1949, les conflits ont fait leur apparition au sujet du transfert de la gestion de Volkswagen. La tutelle de l’entreprise est finalement donnée au gouvernement fédéral. Ce dernier a transféré l’administration de Volkswagen au Land de Basse-Saxe. A cette période, 10000 personnes travaillent pour Volkswagen, la production se situe entre 4000 et 5000 voitures. L’avenir de l’entreprise est plutôt bon. L’obligation de produire pour les alliés donne une avance à Volkswagen par rapport à la concurrence. Opel lance l’Olympia en 1947, Ford produit ses premiers exemplaires de sa Taunus en 1948, Daimler-Benz fabrique 1000 voitures par mois en février 1949. Volkswagen a une longueur d’avance avec 70 000 Coccinelle déjà produites sous la tutelle britannique. 

Volkswagen a acquis sa réputation aussi dans l’exportation. En 1950, 30 000 Coccinelles sont exportées. L’entreprise de Wolfsburg est un symbole du miracle économique de l’ouest-Allemand malgré les difficultés rencontrées. La Coccinelle est une icône qui a acquis une longévité exceptionnelle.